Réalisateur : René Manzor
Scénariste : René Manzor
Actrices et acteurs principaux : Alain Musy, Patrick Floersheim, Brigitte Fossey
La marque de mon téléphone : Samsung
Date de sortie : 17 janvier 1990
Où le voir : YouTube
Synopsis officiel : Un jeune garçon se retrouve nez à nez avec un psychopathe déguisé en père-noël. Quand le monde de l’enfance rencontre celui de l’horreur…
Tu t’es déjà demandé ce que tu te dirais à ton toi, âgé de dix ans, si tu remontais le temps ? Du style “ne couche pas avec ta mère” ou une autre banalité du genre. Moi je l’ai fait et on a parlé de 3615 Code Père Noël.
Noël est arrivé en avance cette année puisque j’ai déjà eu mon cadeau : une machine à remonter le temps flambant neuve. Aventureux dans l’âme, j’ai décidé d’ignorer les pseudos théories du style « il ne faut jamais croiser son double du passé sous peine de devoir revoir Speed 2 en boucle » pour aller me voir lorsque j’avais dix ans. Non pas pour lui expliquer le sens de la vie – il va mériter ce qui lui arrive ce petit con -, mais pour qu’on discute d’un film : 3615 Code Père Noël.
Pour la petite histoire, j’ai le souvenir que le long-métrage de René Manzor m’avait traumatisé à l’époque et je me suis aperçu récemment qu’il était disponible en intégralité sur YouTube. En mec cynique, j’ai décidé d’aller le mater avec ma version rajeunie, pour bien me foutre de sa gueule parce qu’il flippait devant un nanar. Ce naze.
On passe très vite sur la surprise qu’il (enfin que je, puisque ça reste moi, mais on s’embrouille) a eu de voir débarquer un monsieur inconnu dans sa chambre pour passer au cœur du sujet : l’irresponsabilité de sa mère pour lui avoir loué la K7 au vidéoclub (trop de mots compliqués si tu as moins de 20 ans, je sais). Pourtant, tout avait si bien commencé…
PS : pour te faciliter la vie, en vert c’est moi, en blanc c’est le gamin.
“On dirait Maman, j’ai raté l’avion, j’aime trop ce film !
– Ouais, enfin pour l’instant on dirait sa version film de boules des années 70. Ce flou de l’image, ces lumières scintillantes et le jeu digne d’un spot pub de Brigitte Fossey, on va bien se marrer.
– C’est quoi un film de boules ?
– Un film sur le bowling. Bordel, voilà que le gosse avec la coupe mulet la plus abominable du cinéma s’habille façon Commando pour se prendre pour Rambo. Le réalisateur connaît ses références.
– Moi je trouve ça trop cool ! J’adore ces films d’action ! Et puis je suis trop jaloux de sa chambre !
– … Tu m’étonnes, c’est aussi grand que le stade de France. Plus sérieusement, je suis d’accord avec toi, tout le 3615 Code Père Noël semble construit comme un immense coffre à jouets pour enfants, et en même temps, il y a énormément d’idées en termes de décor. Ça participe à créer le gigantisme au sein d’un espace pourtant restreint en apparence ; comme pour confronter l’imaginaire sans limites de l’enfant avec l’esprit emmuré de l’adulte. C’est très malin.
– Qu’est-ce que tu racontes ?”
“Il fait peur le Père Noël…
– Le visage de Patrick Floersheim hantera désormais à nouveau mes nuits…”

J’étais venu pour me moquer, je viens de prendre une claque. Qu’on ait 10 ou 33 ans, on ne peut sérieusement pas encaisser sans broncher une séquence où Manzor filme l’arrivée du Père Noël avec la magie des yeux de l’enfant, avant de tuer, la seconde suivante, le chien sous les yeux du même enfant. J’ai dû mettre sur pause, mon mini-moi chiale tout ce qu’il peut et moi j’ai besoin d’une psychanalyse.
On continue 3615 Code Père Noël, mais on n’a plus le même enthousiasme…
Il faut dire qu’à partir de là, le souvenir que j’avais du film s’évanouit au-delà de mon visionnage actuel. Je comprends pourquoi le gosse assis à côté de moi est mutique, comme en arrêt. Il semble reprendre conscience par moment et pour moi, ça se traduit par les flashs que j’en avais gardé. La préparation des pièges façon Kevin McCallister, le grand-père dans l’armure… mais cette violence, ni lui ni moi n’étions prêts.
Pas que le film soit gore, mais il représente la quintessence du malaise. Rarement, un long-métrage m’avait autant marqué par sa représentation à la fois de l’insouciance et de la cruauté, tout en contraste. L’enfant qui veut survivre, l’adulte qui veut jouer. Derrière ses grosses erreurs de montage et son aspect carton-pâte, 3615 Code Père Noël est un OVNI dans le cinéma français et si, à 10 ans, il m’effrayait, si on en est là aujourd’hui c’est qu’il me fascinait déjà. La peur est partie, la fascination est restée.
L’enfant comme l’adulte, les deux versions de moi-même y ont trouvé une source d’émerveillement et d’angoisse, chacun à des moments différents, se mettant d’accord sur une chose : l’envie d’un gros câlin de réconfort après.