Créateurs : Henri Debeurne, Aurélien Molas
Produit par : Fred Grivois
Actrices et acteurs principaux : Guillaume Labbé, Margot Bancilhon, Olivia Ross
Mon plat pas préféré : le welsh
Année de diffusion : 2019
Où la voir : 13ème Rue
Synopsis officiel : lancé sur les traces d’un tueur en série, Adam, flic endurci mais admiré, survit miraculeusement après avoir reçu une balle dans la tête. Seule séquelle, il souffre d’amnésie. Convalescent, il cherche à savoir qui il est et qui a essayé de le tuer. Quand il découvre une jeune femme attachée et terrorisée dans son sous-sol, Adam fait face au plus effroyable des doutes : et si le tueur qu’il traquait n’était autre que lui-même ?
Envie de nouveauté sans prise de tête, avec seulement quelques épisodes. C'est l'envie- série que je souhaitais lorsque je suis tombée sur Trauma. Au programme, du thriller français apparemment bien ficelé et des acteurs engagés. Optimiste, je me suis lancée corps et âme dans le visionnage. J'y ai laissé malheureusement bien plus.
J’ai voulu bien faire, j’ai regardé une série made in France. J’adore être surprise côté films et/ou séries. Et je me suis dit que ça faisait un bail que je n’avais pas vu une réalisation française. En surfant, je suis également tombée sur un article concernant la série française Trauma. Je ne prenais pas beaucoup de risques.
Déjà, Trauma, ça parle de thriller, d’un policier qui perd la mémoire, de meurtres. Des éléments sympas de prime abord.
Ensuite, j’ai noté qu’il n’y avait que 6 épisodes : même très mauvaise, je pourrais aller au bout de cette minisérie et échapper à la frustration de ne pas connaître la fin d’une histoire (ça doit porter un nom, si quelqu’un sait, ça m’intéresse). Enfin, j’étais déjà tellement contente d’avoir échappé à Plus belle la vie ou Sous un si grand soleil que j’ai réalisé que, pour ma première fois, cette série ne pourrait qu’être mieux. Et justement, faut que je te raconte les impressions, inattendues, d’horreur et d’incompréhension qui sont arrivées à mon cerveau.

C’est l’heure d’aller à l’école
On découvre d’abord que la police nationale n’a plus les moyens de ses ambitions et doit squatter, en lieu et place d’un commissariat, entre les murs d’une école primaire. C’est sympa de prêter un lieu de travail, mais pour montrer l’adaptation de la police française, je pense qu’il y avait mieux à faire.
D’autant que cette dimension “enfantine” n’est absolument pas mise en valeur le long de la série (même lors des scènes de dénouement), alors que franchement le contraste thriller noir/cour de récréation, ça aurait pu être intéressant. Et puis je dis ça, je ne dis rien, mais il y a justement un lien remontant à l’enfance entre les victimes (voir plus bas).
Ensuite, et comme toute bonne série policière qui se respecte, la police a un lieu sympa bien à elle, histoire de décompresser et boire un verre de temps en temps. L’endroit est un restaurant asiatique tenu par un Français dont je pense qu’on peut dire sans hésitation qu’il n’est pas vraiment comédien. Mais surtout, l’endroit apparaît comme quelque chose de grossier, de cliché et sans relation directe, même si c’est ce qu’on veut nous vendre, avec les policiers qui y viennent.
Enfin, le plus important : l’enquête. Par où commencer ? Indéniablement par le gros plan d’intro qui nous montre le visage d’une jeune femme. La caméra reculant, et vu l’expression et les traits, on comprend qu’il s’agit d’un cadavre. Et franchement, j’ai bien aimé cette entrée en matière. L’équipe policière qui vient ensuite sur place a l’air de vouloir faire son job et y met du cœur. Rien d’incohérent ou de trop grossier.

Là où le bât blesse
ATTENTION SPOIL !
Trauma s’entend ici comme appartenant à plusieurs personnages. Une très bonne idée, sauf celle de traumatiser ton spectateur, ça je pense que les scénaristes l’ont pas prévu et c’est mon hypothèse à moi… qu’on sentait venir à des kilomètres. Pour situer simplement les choses. Oui, au début il est bien question d’un meurtre, ni plus ni moins. Bon, ce n’est quand même pas dingue à comprendre quoi. Une jeune femme se fait tuer, elle est laissée par terre.
Et puis, on réalise qu’il y en a d’autres. Y a-t-il un lien à faire ? Oui ? Non ? A ce niveau (oui, déjà), Trauma opte pour une autre option : la complication intellectuelle et, en même temps donc, le brouillage de cerveau du téléspectateur. En effet, l’histoire du meurtre se complique parce qu’on apprend que d’autres jeunes femmes sont tuées aussi. Enfin, je dis « ça se complique ». En fait non, je crois qu’à la police ils ont des super logiciels qui peuvent croiser un tas de données et te sortir en 3 minutes des profils correspondants. Hé bien pas du tout figure-toi.
J’ai franchement halluciné sur cette prise de position de la part du scénariste (donc cette non-explication) : comment l’équipe de police fait-elle pour ne pas tilter plus vite ? comment ne fait-elle pas le rapprochement entre ces meurtres ? Les filles attaquées puis tuées ne le sont pas à des décennies d’écart (grand classique de plusieurs séries policières, et là, effectivement, on est en droit de se demander : Quoiiiii ? Mais comment c’est possible à 20 ans d’intervalle ? Ce serait le même tueur ??). Les meurtres ne sont pas commis à des milliers de kilomètres les uns des autres, non, ça reste du local. Même le modus operandi est à peu près identique sur les victimes. Mais alors pourquoi tant de haine vis-à-vis du téléspectateur, pourquoi lui infliger des passages de « rien », d’un « vide d’enquête » comme je me permets de l’appeler ?
Je suppute que Trauma se contente juste de nous montrer des policiers super sympas mais qui s’embrouillent tout seuls. En même temps, je comprends. Le héros, Adam, a une petite aventure avec sa collègue Julie, donc oui, ils planent tous les deux. Tandis qu’il se demande « Où vais-je avec cette histoire », elle se dit « je vais accepter ce poste loin d’ici et ne pas donner une chance à cette aventure de se concrétiser. De toute façon, il comprend rien ».
Et puis, comme c’est n’importe quoi dans ce commissariat, on envoie la police des polices pour enquêter en interne. Fonctionnaire zélé et plein de questions, le bœuf-carotte Rosen commence à empêcher tout le monde de tourner en rond (au propre comme au figuré), la preuve c’est lui qui, à plusieurs reprises, fait des remarques hyper en adéquation avec l’enquête (!) tandis que le gentil flic Chapelain (un autre collègue) essaie de bosser tranquille (sans résultat, et sans commentaire donc) et que le Commissaire Genton (le grand patron de l’école) tente de faire son boulot de super manager en faisant le méchant qui doit sévir tout le temps et sur tout le monde. Vous avez dit clichés ?

Notre héros, Adam donc, se fait tirer dessus un soir. Normal, il enquête sur quelque chose de très sensible quand même. Peut-être que ça ennuie le coupable qui décide de l’éliminer aussi (non, je ne dirai rien, tu devras regarder la série) ?
En tous les cas, et par chance, il se retrouve vivant et complètement amnésique. C’est donc un formidable coup de théâtre (de boulevard ?) pour amener un élément de surprise supplémentaire. En effet, après une petite convalescence à l’hôpital, Adam réalise qu’il ne se souvient de rien, et surtout de personne, pas même son fils (ce pauvre gamin en manque d’attention de son père). Tu imagines donc bien que, dans ce cas, bah l’enquête, ça devient presque une anecdote au beau milieu de ces six épisodes.
Enfin, il y a le rebondissement qui va tout faire basculer (surtout au niveau de ton oreille interne) : le héros rentre chez lui, pénard, de son séjour hospitalier. Et que découvre-t-on ? Il y a une jeune femme cachée dans sa cave !
Il faut s’imaginer ça tout de même, essayer de se mettre à sa place. Toi, tu aurais été surpris. Dans ta grande compassion, tu aurais été la détacher. Méfiant, tu aurais appelé la police (la bonne blague). Fatigué, tu aurais fait semblant de ne pas la voir pour réfléchir à quoi faire avec ce quelqu’un qui squatte manifestement ta cave. En tous les cas, personne, je dis bien personne, n’aurait eu la réaction qu’a le héros en découvrant Lucia (de son p’tit nom). Bref, c’est tellement agréable de découvrir Lucia que notre héros n’hésite pas et va au bout de lui-même. Pour ça, c’est simple, il lui fait des pâtes, lui permet de prendre une douche et discute le bout de gras avec elle. Voilà, voilà…
Aussi, comme c’est une série qui aime faire traîner, ce n’est qu’à la fin que j’ai compris que le scénariste était en fait un gros blagueur.
A choisir je dois plutôt me situer du côté des littéraires : ma logique vagabonde au gré de mes humeurs et de mon environnement. Mais, la police ! Je me suis dit, la police, eux, ils sont rationnels, ils ont fait une école, passé des concours d’officiers tout ça… Hé ben figure-toi que même moi j’aurai trouvé le lien commun entre toutes ces filles assassinées et fait la connexion de suite : les « mortes » en question étaient en réalité des copines de collège, des copines qui ont un beau jour déraillé (non là non plus pas davantage de détails. Tu devrais vraiment regarder la série).
Sauf que la police de Trauma, elle, elle affiche sur un beau tableau d’école les portraits des victimes, avec tout le dossier : photos de plaies, explications techniques et des officiers ressassant sans arrêt des « Aah, mais pourquoi ?!? » ou des « Je ne vois pas le lien !! » tragi-comiques qui m’auront presque achevée arrivée à mi-parcours de la série. A ce titre, on appréciera notamment certains dialogues éperdument sublunaires, du genre :
Elle : « Mais je pensais que c’était toi le coupable. »
Lui : « Non mais je ne voulais pas te faire ça. »
Elle : « Je comprends pourquoi ça ne t’a rien fait quand je t’ai dit que j’allais avorter. »
Lui : « Mais non, je te jure, tous ces meurtres, je n’y suis pour rien. »

Arrivée à ce stade, je me suis même demandée si l’ « œuvre » possédait une double lecture, un sens caché ? Ah non. En fait, non. C’est juste que les dialogues sonnent creux, les phrases ne se répondant pas toujours. Aussi, et parce que je suis visionnaire et que regarder une série est peut-être plus ludique que lire Platon parfois, je vois bien la diffusion de la série à l’épreuve du baccalauréat, en épreuve de philosophie, coefficient 7, avec le sujet : peut-on rire de tout ? (Vous avez 4 heures).
A moins que Trauma ne cherche justement à nous troubler pour mieux nous permettre de tenter une expérience submersive et douloureuse ? Un genre de performance individuelle, spontanée et presque forcée (décrocher les yeux de ce poste de télé, je dois décrocher les yeux de ce poste de télé si je ne veux pas sombrer. Aaaah j’arrive pas !). Je m’égare… Moi aussi je dois commencer à perdre la boule.
Plus sérieusement, l’amnésie va amener Adam à faire le lien et mettre en parallèle ses souvenirs d’enfance et un tueur qui se fait la main sur des filles du coin. Mais, en même temps vu qu’il est devenu amnésique, il va avoir un réflexe assez étrange et se dire que finalement, si il a enfermé cette fille chez lui, c’est que son « ancien lui » (entendons par là l’agent de police AVANT la balle, la convalescence et l’amnésie) avait une bonne raison de le faire. Adam, d’abord, en agissant ainsi, tu es en total désaccord avec ton travail d’agent des forces de l’ordre. Niveau éthique déjà, tu crains. Ensuite, tu réalises que dans ta vie d’« avant », tu étais une personne quand même menteuse, dissimulatrice et manipulatrice. Tu crains (mais encore plus). Enfin, tu aggraves ton cas quand, arrivé chez toi et découvrant cette fille au sous-sol, tu ne te poses pas les bonnes questions, celles que n’importe qui (même avec des facultés mentales un peu altérées par exemple) se poserait.
Dans un cas comme dans un autre, très franchement, si tu fais ça, tu n’es pas très net, cet avis n’engageant que moi.

En conclusion, il est temps de te parler du dernier épisode. Oui, on y est déjà, pour une raison simple, c’est que c’est le dernier qui concentre le plus d’éléments intéressants et révèle tout. De ce fait, ça crée un gros déséquilibre avec le reste de la série, qui n’aura pas servi à grand- chose au niveau de l’histoire générale. Je me félicite pour ma patience et ma volonté de jusqu’au boutisme, parce que Trauma aura vraiment été pour moi la série de « trop(s) », la série que même quand tu la regardes en accéléré, c’est encore trop long.
Note bene : bien qu’ayant visionné l’entièreté de la minisérie, et notamment la fin, je le jure, des questions simples quant à l’intrigue principale, demeurent dans mon esprit. J’ai cherché, je n’ai toujours pas les réponses.